L’intégration d’éléments de design biophilique joue un rôle clé dans de nombreux espaces hôteliers. Ils peuvent nous aider à nous détendre, à mieux dormir et à nous sentir mieux. Leur influence est telle que nous sommes prêts à payer sensiblement plus cher pour une chambre dans laquelle ces éléments sont très présents (même si nous ne réalisons pas forcément que c’est pour cela que nous payons !). Une chambre avec vue, par exemple, coûte toujours plus cher qu’une chambre sans.
Le rapport Human Spaces « Le design biophilique dans l’hôtellerie » a montré que l’intégration d’éléments de design biophilique dans les espaces hôteliers présentait aussi un intérêt financier. Il y est suggéré qu’à l’échelle internationale, les hôtels (les complexes hôteliers comme les hôtels urbains) faisaient payer les chambres avec vue sur un cours d’eau ou un plan d’eau plus cher que celles avec une autre vue (18,28 % plus cher pour les complexes hôteliers et 11,17 % pour les hôtels urbains)1. De plus, d’après ce rapport, la présence d’éléments de design biophilique dans les hôtels a un impact sur le comportement des occupants et augmente l’utilisation de certains espaces. Une information importante, étant donné que les hôtels cherchent de nouveaux moyens de générer des revenus (sans avoir à proposer une nouvelle chambre) tout en renforçant les liens avec le lieu pour donner plus de caractère et de singularité à leur établissement.
Il a été constaté que les halls d’hôtel avec un design biophilique très présent étaient bien plus fréquentés et utilisés que les halls ordinaires. Les espaces de ce type favorisent particulièrement l’activité sociale (qui y est 11 % plus élevée que dans les espaces non biophiliques !) 2 . Plusieurs hôtels semblent s’intéresser de près aux tendances concernant la sociabilité et le sens de la communauté dans les espaces biophiliques, et transforment leur hall pour encourager leur utilisation (par les clients, mais également par des personnes extérieures).
Les hôtels commencent à intégrer certains éléments caractéristiques des environnements de travail flexible, notamment des espaces de co-working, et indiquent souvent qu’ils essaient de créer un grand réseau et de renforcer l’esprit de communauté. Il a été démontré que le design biophilique encourageait les activités sociales dans les espaces hôteliers. Il peut donc se révéler essentiel pour développer le sens de la communauté et permettre aux gens de travailler et de communiquer efficacement.
Le sens de la communauté et le sentiment de confort sont intimement liés à la santé et au bien-être. Le National Health Service du Royaume-Uni a identifié « cinq composantes de la santé mentale » 3. La première est le lien avec les gens qui nous entourent. Et cela fonctionne dans les deux sens : la communauté peut améliorer le bien-être, mais le bien-être peut aussi être bénéfique à la communauté. Quand nous nous « sentons biens » 4, nous interagissons de façon plus positive avec les autres. Les exemples d’hôtels intégrant des éléments de design biophilique au sein d’espaces de travail/de vie multifonctionnels en vue d’impacter positivement la communauté sont nombreux.
L’hôtel Hobo, à Stockholm, est un exemple particulièrement intéressant : Hôtel Hobo, Stockholm ; https://hobo.se/gallery/
L’hôtel Hobo, conçu par le Studio Aisslinger, se présente comme « un lieu de rendez-vous, de travail, un bureau, ou simplement un lieu agréable où se détendre. » Plusieurs étages sont consacrés à des activités sociales, avec un restaurant, un bar, un espace événementiel et des zones pouvant servir de galeries éphémères à des artistes ou designers émergents. Intégrés dans de grandes pièces ouvertes de type loft, tous les espaces de socialisation sont facilement accessibles au public, ce qui encourage l’utilisation de coins détente conviviaux situés à divers endroits.
Le design de l’hôtel se distingue par l’utilisation de plusieurs éléments biophiliques, ce qui renforce l’esprit de communauté.
Tout d’abord, étant donné que chaque section de l’hôtel comprend plusieurs espaces distincts, chacun y trouve un environnement adapté à ses besoins, à ses préférences et à ses activités. Dans la nature, les écosystèmes ayant une plus grande diversité sont plus durables, et chacun de leurs éléments remplit une fonction spécifique 5. De même, proposer des espaces divers offre aux personnes les conditions optimales pour s’acquitter de leur tâche. Cela leur permet de se réunir, tout en leur laissant la possibilité de former des petits groupes isolés ou de rester seuls pour se ressourcer.
Pour que cela fonctionne, les différentes zones au sein de l’hôtel doivent être clairement définies. Même si d’autres possibilités existent, l’utilisation de différents matériaux, mobiliers ou couleurs peut aider à distinguer clairement quelle zone est associée à telle ou telle activité. La division en plusieurs zones rend la finalité de chaque espace claire et facilement identifiable, permettant ainsi à chacun de choisir son activité avec plus de confiance et de confort. Du fait de notre histoire en tant qu’espèce, nous nous sentons moins stressés lorsque nous comprenons les avantages que présente un endroit (par exemple : sachant qu’un abri nous protège d’une menace, on peut s’y détendre).
Créer des frontières douces entre chacune de ces zones est une autre ruse, inspirée de la nature, pour encourager la communication entre les occupants de l’hôtel. Dans l’hôtel Hobo, de nombreux espaces sont ouverts et leurs limites sont subtilement marquées par des tapis, des textures, des matériaux et des couleurs. Quand on crée un environnement intérieur non cloisonné, on peut améliorer la perméabilité des différentes zones et permettre aux occupants de passer librement d’un espace à un autre. Certaines limites sont utiles pour créer une sécurité émotionnelle et pour aider les gens à communiquer confortablement 6. Cependant, des frontières plus douces permettent véritablement de réduire le sentiment de séparation, et par conséquent d’encourager les groupes à se réunir et à interagir.
En intégrant dans plusieurs de ses espaces des sièges confortables pouvant être déplacés, l’hôtel Hobo permet à ses occupants d’agencer les lieux en fonction de leurs besoins. On estime que les gens sentent plus facilement qu’ils sont des membres estimés de la communauté lorsqu’on leur donne un certain contrôle sur leur environnement physique (pour ajuster le niveau d’intimité par exemple). Ce qui encourage donc la communication ouverte 7.
Mais surtout, du point de vue de la biophilie, Hobo crée un riche environnement sensoriel pour ses habitants. Cela permet d’encourager l’utilisation des espaces sociaux en sollicitant les sens comme le toucher, l’odorat et l’ouïe. Une multitude de plantes et de textiles d’ameublement améliorent l’acoustique et les sièges peuvent être facilement déplacés pour favoriser les discussions à voix basse. Des matériaux chaleureux et agréables au toucher comme du bois, de la pierre et des tissus ont été intégrés pour offrir plus de confort aux occupants. Notre évolution a fait que nous sommes habitués à des paysages stimulant les sens et que nous nous sentons plus à l’aise dans des endroits aux textures contrastées, riches en informations sensorielles.
Enfin, la triangulation est une autre technique biophilique. Cela consiste à créer un point d’attention au sein d’une zone pour captiver et rassembler les gens. Dans la nature, il peut s’agir d’un plan d’eau ou d’un feu, mais Hobo a créé une alternative artificielle. Leur espace SPACEby sert de galerie éphémère pour les jeunes artistes et designers locaux, et rassemble les gens dans un espace de création en constante évolution. Cela permet de créer des relations et des contacts et encourage les visiteurs à fréquenter l’hôtel, qu’ils choisissent d’y séjourner ou non.
References
1 Human Spaces 2.0: Biophilic Design in Hospitality
2 Human Spaces 2.0: Biophilic Design in Hospitality
3 https://www.nhs.uk/conditions/stress-anxiety-depression/improve-mental-wellbeing/
4 Isen, A. M., & Levin, P. F. (1972). Effect of feeling good on helping: cookies and kindness. Journal of personality and social psychology, 21(3), 384.
5 Kellert’s Biophilic Theory : Direct Experience of Nature: Natural Landscapes and Ecosystems
6 Ehrlich, J. J., & Graeven, D. B. (1971). Reciprocal self-disclosure in a dyad. Journal of Experimental Social Psychology
AND Wood, H. G. (1971). An analysis of social sensitivity. Dissertation Abstracts International, 32(2-B), 1200
7 https://hbr.org/2014/10/rules-for-designing-an-engaging-workplace?referral=03759&cm_vc=rr_item_page.bottom